L’EVOLUTION DE LA LANDE |
1-La situation au XVIII° siècle. |
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----------------------- Les cartes de Masse (1708) [1]------------------------------------/----------------------Belleyme (1791)[2] -------------------------------/------------Clavaux (1774)[3] -----------
illustrent parfaitement ce qu’était le pays de Buch au XVIII° siècle : sur la côte des « dunes de sables blancs » qui menaçaient l’arrière pays, à l’intérieur, la lande parsemée de quelques petits bois et deux massifs forestiers : les « montagnes » de Salles et de La Teste.
Cette lande représente ¾ du territoire d’Andernos et d’Ignac, les 2/3 du domaine de Certes, la moitié des paroisses de Lège, Biganos, Le Teich et Gujan, 1/3 du territoire de La Teste et de Lanton, et 3/6 de celui d’Andernos4
En ce qui concerne les forêts,
de Lège à Lamothe, d’une part, du Teich à La Teste d’autre part s’échelonnent
de petits massifs isolés qui se développent en général le long des cours d’eau,
ruisseaux, crastes et berles qui drainent la lande et se jettent dans le
bassin. L’enquête réalisée en 1805/1806 permet d’en avoir une idée précise[5]
, tandis que les relevés
des Cassini[6] qui
furent effectués de 1759 à 1789, repris ensuite dans la carte de Belleyme
(1791) permettent d’en connaître les noms :
-à
Lacanau :
Outre la montagne de Lacanau à l’ouest du lac, dont
Claude Masse en 1708 disait
qu’elle « étoit autrefois
beaucoup plus grande qu’elle
n’est à présent, et
qu’elle se joignoit aux bois qui sont au nord et au
sud », il y a quelques petits massifs sur la rive est,
proches du bourg, entre Lacanau et Talaris, et trois
au sud, (Semignan, Chauconos et Mistres) auxquels
il faut ajouter dans la lande ceux de Narsot, de Méjos Claude Masse,
Montagne
et de Méogas.
de
Lacanau
-à Saumos, quelques bosquets dans les quartiers du grand et du petit Courgas
-au Porge où la famille de Verthamon[7] possédait,
en 1792, 5000 journaux de landes et pins, existent deux petits massifs
forestiers : l’un est au nord de Lauros,
le long de la craste du Placeou,
l’autre entre l’axe Maisonneuve – Las Vignas et le Porge, est situé dans la
lande déjà drainée par des ruisseaux parallèles qui s’écoulent vers l’ouest à
partir d’un grand ruisseau d’écoulement. Celui-ci décrit un arc de cercle du Pas de bouc jusqu’à l’étang de Batourtat en passant à l’est des hameaux
de Lauros, Larruau, Villeneuve et Lascarran. Plus à l’est se
trouve le bois de Mauluguat
- à Lège, 7 journaux de «bois et mauvais taillis » (soit
-dans l’ensemble formé par les
futures communes d’Arès et d’Andernos,
les forêts produisaient en 1784, 17 milliers de résine soit 8,5 tonnes, et il
existait 700 journaux (
Il y a surtout les 400 journaux
(
Cette Montagne se prolonge, plus
en amont, par le bois d’Arpech
(estimé à
-en continuant vers Lanton, se trouvaient, sur les bords
du bassin, deux autres petits bois : l’un entre les ruisseaux du Cirès et de Comte, l’autre au sud du Broustey.
Puis, dans la seigneurie de Certes[11] les 90 journaux du bois de Taussat (
-à Audenge, une garenne de bois taillis de 395 journaux (
Au milieu de la lande, de petits
bosquets isolés comme celui du Gua (.
-en poursuivant sur Biganos, on rencontrait trois bois sur
le Tagon, l’un à l’embouchure, les
deux autres au sud de Caubet et à La
broustouze.
Ce dernier dépendait du Prieuré de Comprian[13]
Celui-ci possédait aussi
un petit pinhadar.
En remontant la Leyre, à Mios, on peut d’après les cartes trouver deux îlots forestiers : l’un essentiellement planté de chênes entre Saint Brice, Arnauton et Coisset, il est limité par le ruisseau de la Sagenne et par la Leyre ; l’autre sur la rive gauche entre Arnauton, Cazes et Basse cour. L’enquête de l’an 4 estime la forêt à 1100 journaux de chênes et 100 de pins soit 18,2% du territoire. La population comptait 66 charbonniers qui d’après l’abbé Baurein (1786) envoyaient le charbon de bois vers Bordeaux, mais devaient en garder une partie pour alimenter les 7 forgerons locaux.
A Salles, on trouve deux ensembles forestiers : sur la rive
droite, un pinhadar qui, vers le sud-est, rejoint le bourg et, vers l’est, la
route Salles-Argilas ; sur la rive gauche la masse importante de
Au sud du bassin, dans la lande,
s’étendaient les grandes parcelles géométriques de la forêt de Nezer[14] (
Enfin à l’est du bourg de La Teste, le bois de Bordes et au sud les deux bois de Notre Dame des Monts et de la Seuve qui sont les derniers bois avant les deux « montagnes usagères » de La Teste (
forêt sur dunes anciennes la plus importante de la région[15], et d’Arcachon qui en a été séparée à partir du XVI° siècle par des dunes mobiles
Les forêts qui entourent La Teste en 1781. (Carte de Charlevoix de Villers)
Des pins et des chênes donc, plus de pins que de chênes d’ailleurs d’après l’enquête faite auprès des maires le 1 germinal an 7[16]. Elle ne concerne malheureusement que les communes de la rive est du bassin et ses données ne sont pas entièrement fiables à cause de la mesure utilisée, le journal. Il valait 28 ares 62 centiares à Lège, Biganos et Gujan et donc vraisemblablement au Teich, mais 31 ares 90 à Andernos (mesure de Castelnau), 23 ares 29 à Salles et Mios et 31 ares 92, mesure de Bordeaux, ailleurs ! Il faut donc en tenir compte pour les conversions en hectares. De plus ces chiffres sont parfois sous estimés par rapport à ceux dont nous disposions pour les périodes antérieures.
Commune Pins Chênes % du territoire Le Teich 515,16 400[17] - Mios
28,29
232,90 - Lège 7,15 0 5 Ares-Andernos 31,90 0 3,80 Lanton 57,24 57,24 4,20 Audenge 114,48 0 17,20 Biganos 372,06 6,01 20,60 Le Porge[18] 607
3,22 |
Pour les communes du sud, il faut utiliser une autre enquête plus tardive de 1827[19]
.Mais les chiffres peuvent varier selon la conversion en arpents de Paris, souvent utilisé dans les premiers cadastres (34,19 ares- pour les communes de Gujan et Biganos) ou en à Andernos et 1 à Lanton arpents des Eaux et Forêts (51,70 ares). Ce qui serait logique puisque dans le premiers cas nous aurions moins de forêts qu’auparavant.
La Teste enquête du 16.06.1827 pins
+ 4194 (forêt usagère)
Gujan « 25.06.1827 pins
Biganos « 15.06.1825 pins
Lège « 1827 ?
Mios « 31.07.1827 pins
Salles pas d’estimation pour les pignadas, taillis et haute futaie.
Selon Fernand Labatut, les pins et
chênes de la montagne couvraient
Beliet ? bois
Belin « 21.07.1827 bois 800 à
C’est d’ailleurs à
Si les bosquets de chênes et de pins situés le long des cours d’eau étaient souvent des massifs naturels, nombre d’autres forêts sont issues de plantations :
-la « montagne » d’Arès semée, on l’a dit, par Pierre Laville au XVII° siècle,
-la forêt du Ponneau, à Facture, par le marquis de Civrac vers 1768/69.
- le bois de Lubec estimé à
- quand Marie de Caupos, épouse
de M.de Verthamon, vend, en 1806, sa baronnie d’Andernos[21],
elle compte « plusieurs pièces en
production de la valeur d’environ 600 hectares » alors qu’en
additionnant les semis de 1784 et les forêts de l’an 7, on arriverait à
-en sens inverse, Daleau en 1804,
indique que « le pignadar de Gujan
fort de 800 journaux (
On peut cependant s’étonner que les forêts n’aient pas été plus étendues
Le sol, plus ou moins marécageux à cause de la présence discontinue de l’alios, avait besoin d’être assaini mais les cartes, en particulier celles de Cassini, témoignent de la rareté des canaux de drainage.
Il y en avait cependant à
Il y en avait surtout un réseau
assez dense dans le quadrilatère limité par les paroisses de Sainte Hélène, Lacanau, Saumos et Le Porge. En
1780, le curé du Porge parle de ces « fossés »
dont les propriétaires des terres traversées doivent payer le « récurrement[22] »
Mais ailleurs, seuls les ruisseaux naturels drainent ces immenses territoires.
Plus tard, au XIX° siècle, le baron d’Haussez, Crouzet et Chambrelent agiront pour systématiser ces traditions déjà anciennes dont Desbiey avait déjà préconisé le développement en 1776[23].
2. LE STATUT JURIDIQUE, OBSTACLE AUX PLANTATIONS
Mais la véritable raison de cette situation, c’est le statut juridique de ces terrains de landes non cultivées, vouées au pâturage, qu’on appelait les padouens et vacants Ils étaient en effet soumis à des droits d’usage au profit des habitants, ces « libertés » dont les cahiers de doléances en 1789 exigeront le maintien.
En 1506, le 30 juin, le seigneur
Jean Durfort de Duras avait confirmé aux habitants leurs droits antérieurs sur
les vacants d’Andernos et Arès : droits de pacage, d’ajoncs, de bruc (la
bruyère) et d’apiés (les ruchers).
Renouvelés en 1619 par Gabriel Dalesme puis en 1702 par Jean Baptiste de
Laville, ils étaient toujours en vigueur en 1792 et concernaient 40000 journaux
de landes (
En 1550,le 23 mai, dans le Captalat de Buch , Frédéric de Foix
reconnaît le droits des « manants et
habitants sur tout ce qui est accoutumé être tenu en padouens et vacants
esdites paroisses de La Teste, Gujan et
Cazaux ».Ces droits , dont il était déjà question en 1500
consistaient essentiellement en « herbatge[25]».Ils
concernaient, au moment de la Révolution, près de 22000 journaux soit
En ce qui concernait plus précisément les lettes, vallées humides entre les dunes, le Captal de Ruat, en 1742 et 1743 , y permettait le pacage, tout en se réservant le droit de révoquer l’autorisation à sa guise (quand il concédait par exemple des « lacs d’eau douce » pour la chasse), il avait fixé é le tarif à 3 ou 1 sols selon qu’il s’agissait de « gros ou de menu » bétail, puis à 2 sols par brebis et 5 sols par vache ou jument, à charge pour l’utilisateur de déclarer le nombre de têtes de bétail[26].
En 1561, le 3 novembre, ce sont
les habitants de Salles qui obtiennent,
de leur Seigneur Pierre de Lur, vicomte d’Uza le droit de « faire paccager les bestiaux et faire leurs
coyallas, dans toute l’étendue des landes, et couper bruc, brande, jaugue et
fougère »[27]
En 1571, le 6 avril, dans le domaine de Certes, Isabelle de Savoie accorde le droit de pacage mais le
limite au nombre d’animaux nécessaires à la production d’engrais[28]. Ces
dispositions sont confirmées en 1736 par Eymeri de Durfort, marquis de Civrac[29], au
moyen de trois textes distincts concernant Biganos,
Audenge et Lanton.
Que représentaient ces vacants/ Il est difficile de le dire.
L’estimation de 1782/84 est de 240000 arpents ; convertis d’après les
indications de Brémontier sur les mesures en usage à
La comparaison avec deux autres chiffres : la superficie
des landes dans les trois communes de Lanton, Audenge et Biganos en 1843 (
Il y en avait aussi
Certes les seigneurs se réservaient en général le droit de « bailler » ces terres à ceux qui « en voudront convertir en labourage pour y faire bled » comme dans le Captalat de Buch, mais la pauvreté du sol et la force des habitudes avaient limité cette possibilité, de plus ces landes et vacants étaient indispensables car terrains de parcours pour le bétail : 6000 têtes de bétail à Gujan (surtout des ovins) et 2000 à La Teste (bovins mais aussi chevaux, au nombre de 146 en 1754.[31]) 700 têtes au Teich dont 1600 brebis appartenant à Ruat en 1775[32]. Pourtant les conflits étaient fréquents, nombre de seigneurs essayant, surtout au XVIII° siècle de rogner les avantages acquis.
Quant aux forêts, elles étaient
aussi frappées de droits d’usage : droit d’affouage , « feussatge » sur le bois
d’œuvre et de chauffage dans les montagnes d’Arès, La Teste et Lacanau, de chauffage à Lanton et, un peu
partout, le droit de prendre des glands,» « glandatge »
pour nourrir les porcs (ou les hommes en temps de disette), comme dans le
Captalat entre la Saint Michel et la Saint André, ou bien encore le droit
d’ « ombrage »
institué à Salles en 1581 qui
permettait aux bestiaux de circuler dans deux bois. Ce droit avait été accordé
par Louis Duluc, vicomte d’Uza, le 3 novembre 1561 : « ne pourra ledit seigneur, pignorer[33] ni prendre aucun
bétail des habitants de Salles trouvés en ses bois seigneuriaux et prés, ni en
faire payer aucune amende en aucun temps »
Ces droits interdisaient la
pratique des clôtures (c’est toujours en vigueur dans la montagne de
Leurs montants étaient parfois réévalués pour tenir compte de l’érosion monétaire. Cela donnait lieu à des conflits et à la signature de nouvelles transactions, mais les sommes restaient souvent symboliques à cause justement de cette érosion monétaire. C’est ainsi qu’à Salles, la charge monétaire moyenne à l’hectare, en argent, grains et volailles, était de 0,414 % et sur les forêts elle n’y représentait que 1,8 % du produit net moyen.
Le meilleur exemple de la
difficulté d’étendre le domaine forestier à cause des droits d’usage sur la
lande est celui de
Vers 1746, Jean Baptiste Amanieu de Ruat et « quelques habitants s’occupèrent à faire semer des graines de pins, d’ajoncs, ronces et de genêts… elles prirent très bien et dans peu d’années , dans cette partie semée, les sables se trouvèrent fixés et arrêtés et, étant devenus grands et presqu’assez pour être exploités, pour produire des gommes, quelqu’un par malice ou sous prétexte qu’il ne pouvait pas faire paccager son bétail, les incendia, ce qui fut cause qu’on cessa cette plantation, crainte d’éprouver le même sort»[34] Ruat, dans un mémoire adressé à M.de Saint Maur en 1776, affirme qu’ils ont eu lieu, 40 ans plus tôt, soit en 1736 et Charlevoix de Villiers écrit en 1778 que l’incendie s’est produit au bout de 15 ans, soit en 1751. Dans les deux cas, il s’agit de vacants situés dans les dunes et dans le second il est précisé qu’il s’agissait de terrains situé au pied des sables issus de la mer. Un autre incendie s’est aussi produit le 31 août 1733, des semis ayant été détruits au lieu dit Birehuc, « à l’orée de la grande forêt »donc à l’est de celle-ci, dans la lande, près du chemin qui allait à Cazaux, le lieu-dit s’appelle de nos jours le Becquet. Les historiens locaux, dont moi-même à leur suite, ont parfois confondu les deux.
Il s’agissait en fait de
réactions tardives à la violation par le captal de la baillette de 1550 qui ne
prévoyait que deux possibilités pour bailler
les vacants dunaires ou la lande : « bâtir moulins à vent » et « convertir en labourage pour faire bled ».
C’est pour la
même raison que le suisse Nezer ne put semer des forêts que dans les landes du
Teich. Il avait pourtant acheté, le 5 février 1766, à François Alain Amanieu de
Ruat « landes vacantes, terres
incultes et en friche dépendant de ses terres en seigneurie de
Si Nezer, ses associés et
ayant-droits, pouvaient « disposer à leur gré » des landes du Teich
où
Malgré ces précisions, les
habitants firent appel car il ne leur restait plus que
3. LES TENTATIVES DE COLONISATION DE
Ce n’était pas le premier à avoir tenté de coloniser la lande, car, malgré les difficultés, les projets fleurissent.
En 1758, le Sieur Laugeay de
Beaune qui se décrit lui-même comme » un homme non ambitieux mais qui a
besoin de s’occuper utilement[36] »propose à l’intendant Tourny de
s’occuper du défrichement des landes appartenant au Roi entre La Teste,
Bordeaux et Bayonne ! Il aurait institué une corvée, chaque laboureur
défrichant 2 à 3 journaux et payant un droit d’entrée de
En 1759, c’est
En 1760, c’est au tour de Raymond de Bellegarde d’obtenir un arrêt favorable du Conseil du Roi concernant les Landes de Bordeaux mais le projet n’eut pas plus de succès.[38]
En 1761, le Conseil, confirmant le texte de 1669, apporte quelques encouragements aux défricheurs et, le 1 juin 1762, ce sont les Lettres patentes royales[39] qui accordent 20 ans d’exemption de dîme, 40 ans d’exemption de franc fief et la réduction d’un centième du denier[40].
Il s’agissait de favoriser les entreprises des sieurs Vallet de Sallignac, De Chazelle et De Mariencourt qui venaient d’obtenir du Marquis de Civrac la concession de 240.000 arpents de landes. L’intendant Boutin ne cacha pas son scepticisme[41] et accumula les arguments : terres stériles, eaux stagnantes et donc habitants accablés d’infirmités, nécessité de « briser l’alioste » pour faire des puits à grande profondeur et des canaux. Il donna cependant son accord pour les privilèges accordés, ajoutant, perfide, que l’Etat n’y perdra rien puisque ces fonds ne rapportent rien.
Les 1700 métairies prévues ne virent pas le jour, De Sallignac quitta le royaume et Civrac ne put récupérer ses terres qu’en 1765.
EN 1765, c’est une autre compagnie ; Rothe, directeur de la précédente associé à De Cléonard qui reprend le projet, là encore sans succès.
Les amateurs pourtant ne manquent pas : en mars 1764, c’est un magistrat d’Auch, Ferraguet, qui se porte candidat[42].
Le 2 mai 1765, c’est un allemand appuyé par D’Ormesson et Choiseul qui propose
l’installation de compatriotes (700 familles) qui devaient aller sur Cayenne et
qui sont libres. L’intendant Boutin approuve le 17 août, mais, comme cela
dépendait du succès de la compagnie Rothe, cela ne se fit pas. Il insistait
aussi sur la nécessaire satisfaction par l’Etat des demandes des promoteurs de
l’opération. Ceux-ci espéraient pouvoir y installer des irlandais catholiques
persécutés[43]: pour chaque groupe de 5
personnes, des hardes pour une valeur de
Mais là encore l’aide ne vint pas.
Les années suivantes voient se multiplier les Arrêts du Conseil et les Lettres patentes pour accorder plus de privilèges aux défricheurs.
Le 4 décembre 1785, c’est en faveur de Ruat[44] afin de faciliter la tentative de Nezer : les avantages sont semblables à ceux accordés à Sallignac mais on y trouve aussi une exemption de taille et de vingtième pendant 40 ans, une réduction à 20 sols de la capitation pout les colons, la réduction de la dîme à une gerbe sur 50[45], et la naturalisation des étrangers au bout de trois ans de présence.
Des dispositions semblables seront généralisées par l’Arrêt de Compiègne du 13 août 1766 puis améliorés, en ce qui concerne les « landes de Bordeaux » par les lettres parentes du 29 avril 1768. Ce dernier texte essaie d’unifier les différentes mesures particulières et prévoit des exemptions (dîme, taille, vingtième pendant 20 ans, franc fief pendant 40 ans) ou des réductions (dîme à la 50° gerbe pendant 40 ans, 1 denier par arpent d’insinuation si le bail dépasse 29 ans, capitation de 20 sols par colon.[46]
C’est surtout cela qui importait : comme le signalait l’intendant Farges, le 20 février 1762, si 28715 arpents avaient déjà été défrichés sur les landes de Nezer et de Civrac, aucun étranger ne s’était installé. Il demande en particulier qu’on valide leurs mariages antérieurs ou futurs et qu’on leur donne l’autorisation de tester et de succéder quelle que soit leur religion. Le but était d’attirer des suisses de la région de Neufchâteau.
Si tout cela ne servit pas, cela montre au moins qu’en cette fin du XVIII° siècle, les aides à l’emploi prolifèrent déjà mais surtout que l’esprit de tolérance a déjà gagné les milieux officiels et que « l’étranger », c’est d’ailleurs une tradition sous l’Ancien Régime, ne fait pas peur.
D’ailleurs à partir de 1768, l’attention se porte plutôt sur les problèmes de navigation et les projets de canaux se multiplient comme préalables au défrichement et à la mise en culture de la lande, le lien étant, on le verra, souvent fait avec la fixation des dunes.
Il s’agit de creuser un futur
« canal des étangs » de Comte
de Montauzier auquel est associé
Clavaux (1773), ce projet appuyé par Desbiey fut refusé par Brémontier qui,
depuis 1770, était en poste à Bordeaux ; la lecture en séance publique de
l’Académie de Bordeaux du mémoire des frères Louis Mathieu et Guillaume Desbiey « Sur l’origine des sables de nos côtes et les moyens de les
fixer » ; le projet d’un canal de Bègles à Arcachon par Péconnet (1775) qui reçut un avis
défavorable de Turgot ; le mémoire de Guillaume
Desbiey « Sur la meilleure
manière de tirer parti des landes de Bordeaux » (1776) ; celui de
Lorthe sur un canal Garonne-Arcachon-Adour
accompagné d’un port à Arcachon, projet autorisé par Louis XVI mais abandonné
faute d’argent ; celui, enfin, d’un certain Ferbaux sur le canal Bordeaux-Bayonne que l’intendant Saint Maur
refusa (1777).
Beaucoup plus sérieux furent les travaux menés par l’Ingénieur du Roi, Charlevoix de Villers[47] en 1778 à La Teste. Dans ses cinq rapports, dont le dernier fut remis en 1781, avant son retour à Saint Domingue, il envisage tout ce qui se fera plus tard : la fixation des dunes et ses techniques, « utilisées » plus tard par Brémontier, le percement de canaux entre les étangs, le développement des crastes pour drainer la lande, la plantation de pins dans les zones impropres aux autres cultures, le développement des prairies artificielles pour accroître le rendement du bétail….Bref un visionnaire abondamment utilisé et donc souvent oublié, mais aussi un homme d’affaires se mettant à dos la population, outrepassant souvent sa mission et l’abandonnant au profit d’un projet d’endiguement des prés salés par la compagnie du Sieur Gier, qui en avait obtenu la concession en 1780, entreprise à laquelle il aurait été intéressé et qui lui valut sa disgrâce.
Charlevoix de Villers : Projet de canal
entre
Dans les années qui suivirent, on reparla encore du canal avec le projet Chevalier-Duplessis[48] de 1782, mais il est là encore refusé par Dupré de Saint Maur car les priorités ont change : ce sont désormais les dunes qui retiennent l’attention.
Cette prolifération de projets témoigne de la vigueur de l’esprit physiocratique dans les élites locales de la fin du siècle. Ce=t esprit nouveau attira dans la région nombre de promoteurs aussi enthousiastes que malheureusement désargentés.
Donc la lande resta presque partout vaine, jusqu’à ce que la Révolution et des années de procédures règlent la question du droit de propriété et des droits d’usage ce qui ne calma pas les porteurs d’idées nouvelles à preuve les mémoires adressées en 1809 par Paul Courbin de Mios qui demandait la concession de toutes les terres vaines et vagues appartenant à l’Etat depuis l’estuaire de la Gironde jusqu’à…Bayonne !!! [49]
4. LE PARTAGE DE
Le sort des terres vaines situées en arrière des dunes ne fut pas réglé facilement. D’après les lois des 14 aout 1792 et 10 juin 1793, complétées en février 1804, et en vertu de l’abolition de la féodalité, les communes étaient considérées comme propriétaires des landes et vacants, à condition que les anciens seigneurs, leurs héritiers ou leur successeurs ne puissent prouver qu’ils les avaient régulièrement achetées.
Les communes avaient la possibilité de partager ces vacants entre les habitants contre une somme calculée sur leur revenu au moment du partage. Cela, certains n’ayant pas attendu les partages officiels, provoqua maintes querelles.
A cela s’ajoutaient les terrains
qui, pour cause d’immigration ou de condamnation de leurs propriétaires,
avaient été confisqués par
Le début du XIX) siècle est donc fertile en contestations et procès qui finirent par aboutir à des partages plus ou moins amiables. Mais il faudra attendre les lois de 1857 enjoignant aux communes de vendre leurs communaux pour les ensemencer en pins, pour voir la lande se couvrir presqu’entièrement de forêts.
Au TEICH, tout avait été vendu à Nezer.
A GUJAN et à
Sur ce total, 1012 revenaient à
la commune de Gujan soit
Le premier partage avait eu lieu
en septembre 1793 puis annulé parce que contesté ; il fut refait en
décembre mais, en 1802, le Conseil Municipal, saisi par des habitants, demanda
que la lande soit remise en l’état antérieur à
Quant au reste, situé sur la
commune de
Mais il n’y eu toujours pas de
forêts, la baillette de 1500 et le Maire de
Le tableau ci-dessous donne en ce qui concerne le sud-bassin, le bilan en hectares des landes communales (en italiques) et privées dans la première moitié du siècle. Quand le chiffre est en gras, il représente le total. Les chiffres varient selon qu’il s’agit des estimations des Maires ou des relevés cadastraux; quant à celui de 1857, il s’agit des surfaces communales à ensemencer inventoriées par Chambrelent.
Communes 1827[50] I843[51] I852[52] I857 La Teste 9- 4420 4430 0 Gujan 1203- 90 338-3183 221-3135 0 Le Teich 1839-4541 628 1,27 Total du canton Communales et privées)
14331[53] 13118 [54] |
Ce tableau appelle trois remarques :
-
pour l’enquête de 1827, il faut, pour Gujan, ajouter
les landes de Nezer estimées en 1819 à
-
Sur les
-
-A
Dans le canton d’Audenge, le
partage des landes eut lieu en 1846 entre d’une part les communes de Biganos et Lanton qui obtinrent
respectivement 681 et
« Les landes Bettereau ». Lors du procès de 1835,
Par contre à Audenge, les héritiers Civrac n’ayant
pu fournir de titre de propriété, c’est la commune qui récupéra le tout,
A Mios, comme il n’y avait pas eu de vente en 1798, c’est par contre
la totalité des biens de Civrac qui furent partagés entre la commune (
A Ares, le domaine de Belcier ayant été vendu en 1798 à Duprada puis à Hirribarne, c’est en1847 que son successeur Javal commença à effectuer des semis car les droits de parcours étaient éteints depuis 1789 comme le reconnut un jugement de…1851.
A Lège enfin, les landes avaient appartenu à M.de Marbotin qui
n’avait pas émigré et fut inscrit en 1791 et 1792 sur les rôles de la
contribution foncière, preuve de la reconnaissance par la commune de ses titres
de propriété. C’est pourquoi celle-ci fut déboutée dans sa revendication de
propriété, le 12 janvier 1826 par
La répartition des landes communales et privées s’établit donc selon le tableau suivant avec les mêmes réserves que pour le précédent.
Communes An 7 [55] 1827 1843[56] I852 I857 Biganos 3972 935/954 2719/2807 5623 1105 Audenge 40 3610/2625 6732 3516 Lanton 2289 11116/ 91 12012 4726 Andernos-Ares 382 0/5542 1648 711 Ares 3892 1798 Lège
851 0/7711 2009 CANTON 37582 32811 Mios 931 6072/2167 4866/5297 2282 Salles 7483 4500/3000 8071 4357 Beliet 3500 2825/ 224 379 Le Porge 5745 5548/1168[57] 3957 |
Comme on l’a vu précédemment,
les réponses de Maires à l’enquête de l’an 7 ne sont pas fiables, mais on leur
demandait d’estimer des
« pâturages » ;
Il est d’autre part intéressant de montrer quel est, vers 1850, le pourcentage de landes par rapport au reste du territoire et aux forêts, leur superficie en hectares et quel est, dans chaque secteur, le nombre de parcelles. Les calculs que j’ai effectués sur les matrices cadastrales donnent les résultats suivants ;
Communes % de taillis ou bois taillis nb de parcelles pins % landes % Biganos 5,56 288 168 5,14 692 74,98 Audenge 6,78 248 106 3,69 321 83,15 Lanton 3,00 165 218 2,15 606 89,38 Andernos 1,77 34 60 11,40 161 74,85 Ares 2,16 43 49 5,26 87 84,79 Lège (sans les dunes) 1,30 81 86 1,90 162 87,07 Le Teich 6,43 195 28 37 53 7,25 Salles 6,40 604 1628 I9,98 1151 59,24 Mios 11,54 1658 985 3,35 2627 78,67 |
Nous pouvons constater un très grand morcellement du parcellaire qui ne signifie pas toujours un éparpillement de la propriété. Celle-ci est particulièrement concentrée comme le montre le tableau suivant où j’ai classé les communes en fonction de l’importance des grandes propriétés privées de landes.
Commune Superficie/ propriétés de + à celle de la commune privée totale propriétaires
Lège 7604 98,71 Balguerie 7500 Desplanche 105 Gujan 338 3034 95,28 Degruhère 3034 La Teste 4125 93,09 [58] Cie Nezer 4125 Le Teich 1839 4150 91,38 [59] « 4060 De Lauzac 91 Andernos 5160 90,39 Balguerie 3374 De Sauvage 1480 Vve Sutton 507 Audenge 3610 5789 68,84 De Boissière 1458 Hazera 516 Dumora 208 Mios 4865 1988 37,53 Lacouen 1072 Garnung 580 Courbin F. 176 Mano 140 Biganos 3276 [60] 467 20,95[61] Dumora 326 Dubourg 142 Lanton 11116 189 20,65 Argilas 189 Le Porge 5325[62] Bacquey Jeune 21 Digneau Jeantet 19 Salles 6924[63] Cazauvielh Arn. 53 Brun Arnaud 73 |
On constate donc qu’en dehors de Mios-Biganos ou Lanton où la grande propriété est minoritaire, il y a deux communes où elle est pratiquement inexistante, Salles et Mios parce que les communes y possèdent respectivement 93 % et 76% des landes. Mais partout ailleurs c’est le règne de la grande propriété
Comment a-t-elle évolué, les propriétaires l’ont-ils boisée, c’est ce que vont nous apprendre l’examen des cadastres dits « impériaux » au milieu du XIX° siècle. C’est en effet l’examen des matrices cadastrales qui permet d’avoir une vision précise des forêts existantes dans chaque commune, à l’exclusion des semis sur dunes qui feront l’objet de la seconde parte.
5. LE BOISEMENT DE
Les communes du sud
En 1849, le bourg est entouré d’îlots forestiers :
A l’est, dans la section dite de
Bordes, il y a
Au sud et au sud ouest, ce sont
les pins de la lède de la
seuve (
(
A l’ouest, enfin, le petit bois
dit du Braouet s’étend sur un peu
plus de
Le reste des plantations de pins
se trouve plus au sud dans les domaines appartenant à
Quant à la répartition sociale,
elle respecte dirais-je la tradition :en dehors des Compagnies, rêves de
bordelais ou d’aristocrates piqués d’agronomie, c’est la bourgeoisie locale qui
concentre en ses mains la propriété foncière, c’est aussi le cas dans les
Un exemple de rêve,
celui de la « Compagnie
d’Arcachon » dont les domaines jouxtaient à l’est, hors du Captalat, les
semis de la compagnie de Nezer.
La baillette de 1550 interdisant la plantation de pins, différentes
cultures furent envisagée : des pommes de terre, du colza, du maïs et
diverses céréales, et aussi des mûriers pour l’élevage des vers à soie.
Mais l’aridité du sol, le manque d’eau malgré les espoirs nés de la
construction du canal, l’inexpérience pratique des « directeurs »
eurent raison de l’enthousiasme des promoteurs.
Après la liquidation de la
compagnie, d’autres essais furent tentés
comme la riziculture et une autre utopie vit le jour, celle d’employer des
chômeurs, conçue par un des anciens
directeurs le Comte de Blacas Carros qui créa l’éphémère « Compagnie de colonisation des Landes
de Gascogne ».
GUJAN : Dans cette autre commune de
l’ancien Captalat de Buch, la comparaison entre les chiffres de 1827 et ceux du
cadastre impérial, établi vers 1850, montre peu de changements hors l’action,
comme à
Quelques gros îlots dans la
lande : une trentaine d’hectares à
Pour le reste, on arrive à un
total de
Il y a donc une nette opposition
entre quelques gros propriétaires et une foule de petits propriétaires
exploitant, près des bourgs, les mêmes superficies que 25 ans plus tôt, sans
chercher à les augmenter, car le vignoble, certainement plus rentable, se
partage, avec les cultures, la plus grande partie de ces zones où l’on ne
trouve que très peu de landes, seulement
A ce total de
Quant aux semis, il n’y en a que
En effet, les
Il en fut de même à
LE TEICH : La situation y
est très différente puisque l’ensemble des surfaces boisées représente 51,44 %
de la superficie de la commune voire 54,20 % si on enlève la section dite des prés salés où l’on trouve
cependant
Ces forêts se répartissent en
Ces dernières correspondent aux
propriétés de la compagnie d’Arcachon, héritière de Nezer (environ
Quant aux
La commune du Teich, présente donc un visage très différent de celui de sa voisine Gujan, surtout à cause de sa situation géographique (la présence de la rivière), historique (celle du château de Ruat) et sociale (absence de droits d’usage sur la lande). A coté des zones humides naturellement boisées et de la multiplication de petites parcelles proches du bourg, cela a permis la constitution de très grandes propriétés forestières où la culture du pin est déjà très « moderne ».
Cette tradition forestière qui se retrouve aussi à La Teste, mais pour d’autres raisons (forêt usagère et semis sur dunes) a en partie façonné les mentalités et guidé l’action des municipalités. Elle ne se retrouve pas à Gujan où la forêt est plus récente.
Pour l’ensemble du canton, la situation, en 1852 se présente ainsi[65] :
Les communes de la rive Est.
Par contre, pour les communes qui s’étendent de Biganos à Lège, il n’y a pas eu de gros changements. Si la superficie des forêts a augmenté depuis 1827, la lande est toujours prépondérante, comme le montre le tableau suivant résultant, là aussi de l’analyse des cadastres impériaux.
La première colonne indique la superficie, arrondie, en hectares, la seconde, le pourcentage par rapport à la commune.
Communes Taillis et futaie Bois de pins landes bois taillis
Biganos 417 5,56% 385 5,14 % 5624 74,98% Audenge 549 6,78 299 3,69 6734 83,15 Lanton 404 3,00 289 2,15 12026 89,38 Andernos [66] 39 1,77 251 11,40 1648 74,95 Ares 99 2,16 241 5,25 3893 84,79 Lège 30 1,30 44 1,90 2010 87,07 Le Porge 18 0,26 552 8,75 5732 85,34 |
En ce qui concerne la répartition géographique et sociale des forêts de pins, on constate qu’elles sont toujours situées dans les mêmes secteurs et que, si de grandes propriétés forestières privées commencent à poindre, elles sont encore minoritaires.
A BIGANOS, les boisements en pins sont toujours concentrés vers Lamothe ainsi qu’au lieu-dit Les sauzes, soit 5,14 % du territoire sur 168 parcelles.
A AUDENGE seules 16 parcelles
sur 106 sont supérieurs à
A LANTON, ce sont 27 parcelles
sur 218 qui dépassent
A ANDERNOS, c’est M. De Sauvage,
acquéreur en des propriétés Hirribarne,
anciennement Belcier, qui avec
A ARES qui vient, en 1851 de se
séparer d’Andernos, la situation est semblable : sur 49 parcelles, toutes à M. De Sauvage totalise
A LEGE enfin, 10 parcelles de
pins dépassent l’hectare mais la plus grande n’atteint que
Pour l’ensemble du canton
d’Audenge, il y a, en 1852,
Au PORGE, il n’y avait, lors de
la confection du premier cadastre en 1827, que 6 parcelles de pins dépassant 5
hectares ; la plus grande en avait 8, quatre appartenaient au sieur Brun
et les deux autres au sieur Laguayte. Même situation pour la lande avec une
seule parcelle importante de
Les communes du Val de Leyre. [67]
Pour les deux communes de Mios et de Salles[68], la répartition de la couverture végétale est la suivante :
Communes bois taillis et futaie bois de pins taillis et landes landes landes et pins Salles 873 6,40% 2722 19,80% 73 0,53% 8071 59,24% Mios 885 6,61 433 2,57 563 4,35 9982 77,34 |
La encore, la part des landes est prépondérante, surtout à Mios ; les tableaux suivants donnent la répartition, par section, en pourcentage de la superficie totale, avec, en italiques le nombre de parcelles
SALLES, sections bois taillis pins landes A (du Bougès 21,7 84 25,10 119 16,3 121 B (d’Argilas) 17,8 308 6,25 99 57,9 281 C (de Vignolles) 1,7 72 13,90 281 72,5 185 D (de Badet) 2,9 68 16,50 209 75,4 220 E ‘du Bourg) 22,9 101 8,50 55 28,5 54 F (de Lanot) 7,9 90 57,10 47 14,4 99 G (de Peyreherine) 0 0 5,50 78 93 45 H (de Caplanne) 3,2 82 31,80 385 55,4 156 _______________________________________________________________________________________________ MIOS A (Ramounet) 4,86 117 2,28 94 86,77 217 B (Lillet) 28,63 507 2,52 51 31,99 446 C (Bourg) 4,68 585 4,86 260 76,44 1273 D (Caudos) 5,78 429 1,97 104 86,40 708 |
Pour Salles, si l’on compare
avec la répartition des forêts au XVIII° siècle (carte de Belleyme) on constate
qu’elles se sont un peu développées dans les quartiers de Lavignolle et du Bougès où
elles étaient pratiquement inexistantes, qu’elles ont bien progressé dans celui
de Caplanne mais que l’essentiel est
encore constitué par
A Mios la part des forêts est
beaucoup plus faible et aucune partie de la commune ne se distingue par la
présence de forêts importantes.
A Salles, la répartition des parcelles
selon la végétation est la
suivante ;
Végétation nombre de parcelles superficie moyenne des parcelles Bois taillis
804 Pins 1628 1,67 Lande 1151 7,01 |
En ce qui concerne les seuls bois de pins, nous obtenons les chiffres suivants :
Superficie nombre de parcelles Propriétaires importants
1 à
5 à 10 59
10 à 20 22
20 à 50 10 Cazauvielh(4), Dupuch (2), Comte de Puységur (1)
50 à 100 2 Puységur (2)
+
100 2 Dupuch et Puységur qui,
avec
A Mios, par contre, on constate que, dans l’ensemble, les parcelles de pins sont petites, la moyenne des propriétés s’établissant ainsi :
Moyenne des superficies Section A Section B Section C Section D
Des parcelles 0,75
ares 44 ares
Par propriétaire
Parcelles de 1 à
« 3 à
+
Il n’y a donc pas beaucoup de gros propriétaires et très peu
de propriétés d’un seul tenant. Ainsi, en Section A, Taudin, dit Lachaume,
totalise un peu plus de
On constate donc qu’au milieu du XIX° siècle, les landes du
Pays de Buch ne sont pas encore sauf exceptions, couvertes comme de nos jours
de forêts. Ce n’est que dans la seconde
moitié du siècle, grâce à des initiatives privées et surtout à l’engagement du
pouvoir politique et de Napoléon III que les forêts de pins se développeront.
Ce sont en effet les lois de 1857 qui donneront l’élan décisif en obligeant les
communes à semer en pins leurs communaux.
6 INITIATIVES
PRIVEES ET INTERVENTION DE L’ETAT.
Avant même que l’Etat intervienne en 1857, des initiatives privées avaient déjà contribué au boisement de la lande ; trois noms dominent ces entreprises :
-François et Ernest
Valeton de Boissière.
François, négociant à Bordeaux, est propriétaire du domaine
de Certes depuis 1818 :
Il s’agissait de délimiter, par un fossé continu, un
quadrilatère de 200 sur
-Javal :
banquier parisien, il achète en 1847, à David Allègre,
En 1860, il se trouve ainsi à la tête de
-et
89% de ses landes ont donc été converties en pins et 6% en
cultures. Cette réussite lui vaut en 1860, la médaille d’or du Concours
agricole de Paris. Cette réussite a été, là aussi, permise par le creusement de
Ce domaine Javal passera ensuite aux mains de sa fille,
épouse Wallenstein, puis donnera naissance, en 1919, à
-Pereire :
ce banquier, fondateur de
Ces propriétés, traversées par la voie ferrée, forment alors deux domaines plantés en pins ;
-le domaine de
Marcheprime (
-le domaine de Caudos :
Auxquels s’ajoutent celui de Cestas (
Après avoir imaginé un système de drainage enterré, Pereire appliqua les techniques préconisées par l’ingénieur Crouzot, Chef du service Hydraulique des Landes.
Ces « étrangers » contribuèrent donc pour une très grande part au boisement de la lande, développant à grande échelle des techniques d’assainissement
déjà connues mais peu employées jusque là. Cette entreprise, réservée jusque là aux terrains privés, fut encore amplifiée lorsque l’Etat décida, à son tour, de la prendre en charge, ou plutôt de la faire prendre en charge par les collectivités locales.
C’était d’ailleurs l’aboutissement d’une longue tradition
d’efforts menés, on l’a vu, sans succès, par les administrations régionales au
XVIII° siècle et poursuivis ensuite à preuve les circulaires du baron d’Haussez,
demandant aux communes, dès 1817, alors qu’il était Préfet des Landes, de
réserver chacune
La loi du 19 Juin 1857, enjoignit en effet aux communes, ou à l’Etat, en cas de défaillance de ces dernières, d’assainir, ensemencer ou planter en bois, à leurs frais, les terrains communaux soumis au parcours du bétail.
Il fut aussi prévu de créer un réseau de routes
agricoles : c’est ainsi que furent réalisés les axes Facture-Ares,
Facture-Beliet,
De plus le 10 juin 1854, une loi avait prévu toutes les conditions nécessaires à la réalisation d’un réseau de drainage.
Enfin les communes obtenaient la
possibilité de vendre les terrains susceptibles d’être mis en culture afin de
financer leurs investissements publics.
Ces textes permirent de parfaire la transformation bien entamée des paysages mais il est difficile de connaître leur impact immédiat sur les boisements tant les chiffres sont imprécis. Par exemple, ceux donnés par Chambrelent[69] sur la superficie des landes communales en 1857, ne correspondent pas toujours à ceux qu’on trouve dans les archives. Cependant un document, malheureusement non daté, mais qui, par recoupements, doit être de 1858/59, donne, en hectares les chiffres regroupés dans le tableau suivant (ceux qui sont signalés par* se retrouvent dans les tableaux de Chambrelent, sinon les siens sont transcrits en italiques.)
Chambrelent
Communes étendue des
landes communales projet pour vendues en
Superficie totale
ensemencée
vendues 1860 1861
1877 Biganos 1263 (1105) 300 556 1058 Audenge 3156 (3516) 900 1132 1251 Lanton 4726* 0 1400 1746 Andernos 711* 150 232 240 245 Ares 1613 (1798) 425 530 115 Mios 2134 (2282) 700 167 550 853 Salles 4957* 1250 1250 2230 Le Teich 1277 201 Le Porge[70] 3957 2142 |
Cela montre, malgré l’imprécision des chiffres, que la loi a eu des effets rapides sur les ensemencements en pins. La conjoncture était d’ailleurs favorable, l’âge de « l’arbre d’or » commençait, les cours de la résine ayant fortement augmenté.
Quant aux parcelles vendues, elles ont été mises en culture
et cédées la plupart du temps en très petits lots afin de permettre au plus
grand nombre d’en acquérir. Deux exemples, à Biganos où
Passer de la lande à la forêt fut donc un e entreprise de
longue haleine.
Comme toute entreprise d’aménagement du territoire, elle a eu besoin de
visionnaires, les précurseurs ; ils se sont heurtés aux habitudes et à
l’incrédulité et sont restés parfois oubliés car ils ne possédaient l’art ni
les moyens de, comme on dit aujourd’hui, médiatiser leurs idées et n’étaient
pas toujours dans les allées du pouvoir (Desbiey, Villers..).
Il a aussi fallu une évolution des mentalités et de la législation : lois révolutionnaires de 1792,1793 et « impériales » de 1904,1854 et 1857 ; mais il a fallu aussi des conditions économiques favorables, ainsi la barrique de résine valait en monnaie constante 23 francs en 1816,43 en 1840,55 en 1854 et 68 en 1857.
Enfin cela ne put se faire sans l’engagement de l’Etat, de ses administrateurs (Boutin, Tourny, Dupré de Saint Maur, le Baron d’Haussez) des ses ingénieurs ‘Crouzet, Deschamps, Chambrelent) et parfois pour briser les dernières résistances du pouvoir politique (Napoléon III) afin de parachever le tout et de consacrer, par la loi, la nouvelle situation.
Il est d’ailleurs remarquable que cet engagement ait été constant depuis le XVIII° siècle, quels que soient les régimes politiques.
Il en sera de même pour l’autre volet de cette révolution forestière, la fixation et la plantation des dunes.
[1] Claude Masse, ingénieur
général du Roi, reprit en 1706 les levés de la côte du Médoc qu’il avait
commencés en 1688.
[2] Belleyme, ingénieur géographe
du Roi, fut, en 1176, chargé de la gravure des planches cartographiques de la
Guyenne.
[3] Clavaux : Travaillant pour le marquis de Civrac et résidant à Certes, il fut chargé, à partir de 1772 de la confection de cartes du bassin. Les modifiant en 1772,1774 et 1776 en fonction de l’évolution des chenaux et des bancs.
4
ADG
[5] A DG
[6] Cassini : César
François Cassini de Thury (1714-1784), directeur de l’Observatoire de Paris
entreprit la grande carte de France en
180 feuilles que termina, après 45 ans de travail, son fils Jacques Dominique,
comte de Cassini (1748-1845).
[7] François Martial de
Verthamon (1724-1764) époux de Marie de Caupos (unique héritière de sa famille)
était entre autres, baron de Lacanau,
Andernos et Ignac, vicomte de Biscarrosse….Il eut 7 enfants dont les deux aînés émigrèrent sous la Révolution
provoquant ainsi la dislocation du patrimoine familial.
[8]Une garenne est une étendue
boisée ou non, qui est une réserve de chasse, si bien que les lapins s’y
multiplient. D’où l’expression « lapin de garenne »
[9] De Belcier Crain, seigneur d’Arès, possédait aussi des biens fonciers en Entre deux mers. A Arès outre le « château » il possédait 420 journaux d’enclos, 400 de pins et 4000 de landes qui formaient les communaux d’Ares et Andernos. Ses fils ayant émigré, les François domaines furent confisqués et lui-même fut condamné à mort et exécuté le 22 juin 1794.
[10] Baron d’Arès, il naquit
en 1675 et s’éteignit en 1754. Possédant aussi des biens à Soulac
(marais-salants) il fut capitaine major des gardes côtes de la Teste. A sa
mort, la seigneurie passa à sa fille puis à son petit-fils François de Belcier.
[11] Le domaine appartenait au
XVIII° siècle au marquis François Eymery de Civrac. Ses possessions
s’étendaient sur les paroisses d’Audenge, Lanton, Biganos, Lamothe et Mios,
(le captalat de Certes) mais aussi sur
St Jean d’Illac, Le Barp et Le Porge. Le domaine de Certes fut vendu comme bien
national, au profit du sieur Dauberval, il fut ensuite acquis par François de Boissière en 1818 qui en, 1837,
lui ajouta
[12] ADG
[13] Le prieuré de Comprian,
étape dur la route de Saint jacques de Compostelle et lieu de sépulture du
premier Captal de Buch, n’était plus, au
XVIII° siècle, qu’une source de revenus
pour le chapitre de Saint Seurin de Bordeaux dont il dépendait.
[14] Le suisse Nezer acheta 40000 journaux de landes au Captal de
Buch (
[15] Sur cette forêt voir le site internet «r.aufanforêtusagère@free.fr »
[16] ADG
[17] ADG
[18] Cadastre de 1827
[19] En 1780/89, d’après les contrats de mariage
[20] ADG notaire Mathieu 11.10.1806
[21] ADG C 307 lettre du 12
janvier 1781 au sujet de la culture des « patates »
[22] Guillaume Desbiey « Mémoire sur la
meilleure manière de tirer parti des Landes de Bordeaux quant à la culture et à
la population »
[23] ADG 3E 20907
[24] Collection des divers titres qui servent de fondement aux usages. Bordeaux, chez Durand, imprimeur de la préfecture.
[25] ADG 3E13134 (1742) et
3E30911 (1743)
[26] Archives nationales B III
173, Cahier de Doléances de Salles. 1789, les « coyalas ou cujulas » sont des parcs à bestiaux avec parfois
une cabane pour le berger.
[27] ADG 3E 1379
[28] C’est en 1736 que Civrac échangea avec Jean Baptiste de Ruat, la seigneurie du Teich contre celle d’Audenge.
[29] ADG 3E 21539 du 15 mars 1736
[30] ADG C 1269
[31] ADG C 291
[32] Le mot vient du verbe
latin pigneror, prendre en gage. Dans le droit romain, le créancier pouvait, de
sa propre autorité, se saisir des biens de son débiteur.
[33] ADG 2E 25161, notaire Soulié ; acte capitulaire passé au devant de l’église de La Teste le 7 mai1776.
[34] R. Delage: « Du
droit d’usage dans la forêt usagère de La Teste» Cadoret, Bordeaux, 1902.
[35] ADG C 3672, lettre à Tourny
[36] ADG C 3672
[37] ADG C 3672, 78 juin 1760
[38] ADG C 3672
[39] La dîme est due au clergé
et perçue en nature, à La Teste, elle correspond à 1/11° des gerbes de blé,
1/6° du millet, du vin et du bétail. Le franc fief est la taxe que doit payer
un roturier possesseur d’un bien noble et le denier est un impôt sur les
mutations de propriété.
[40] Lettre au Contrôleur Général Trudaine 1762
[41] ADG C1328
[42] Lettre à Choiseul d’avril 1765
[43] DG C3671
[44] La taille royale était un impôt direct sur les revenus estimés ou sur la tenure. Le montant annuel, fixé par le roi était très inégalement réparti entre les différentes parties du territoire. Nobles et clercs étaient exemptés. Seuls les roturiers la payaient. La capitation était un impôt par tête, payé par tous, sauf le clergé dispensé depuis 1701 contre un don à la couronne.
[45] Le vingtième équivalait à la vingtième partie du revenu ; les insinuations étaient des taxes sur l’enregistrement des actes.
[46] Le baron Louis Roger Charlevoix de Villers, Ingénieur en chef de la marine et des colonies, est chargé d’étudier la création d’un port miliaire dans le bassin et d’un canal le reliant à l’Adour. En conflit avec son adjoint Clavaux et l’Intendant Boutin, il quitta La Teste pour Paris puis Saint Domingue vers 1783
[47] ADG C 1951
[48] ADG 7M 640
[49] ADG
[50] ADG
[51] Cadastres dits « impériaux » archives municipales.
[52] Chambrelent : «L es
landes de Gascogne »1877
[53] ADG
[54] ADG
[55] ADG II L 216 Réponse des Maires 1 germinal An 7
[56] ADG 7 M 640
[57] Pour Beliet et le Porge, les chiffres de 1843 sont ceux du 1 avril, ce sont donc des estimations.
[58] Les seuls « gros » propriétaires sont Fleury (70) et Condou de Biscarrosse (40)
[59] Pour le reste, 6
propriétaires ont des parcelles de10 à
[60] Ce chiffre comprend ce qui appartient à la commune de Biganos (271° ainsi que les communaux des habitants de Tagon (247), du Vignau ((257) et des Argenteyres (103)
[61] Pour le reste 4 propriétaires ont entre 15 et 75 hectares : les Laville (73+55), Hazera de Salles (56) et la Veuve Viardot de Bordeaux (15).
[62] Ces chiffres sont tirés du cadastre du 15 décembre 1827
[63] Cadastre du 20 janvier 1843.
[64] ADG
[65] Chiffres tirés du cadastre de 1827
[66] A Andernos comme à Ares ce sont les cadastres d’après la séparation de 1851.
[67] ADG Pour Salles, le relevé est daté du 20 juin 1844, pour Mios, il s’agit du « cadastre impérial » mais il n’est pas daté.
[68] ADG
[69] Chambrelent, (1817-1893), propriétaire du domaine de Saint Alban, à Cestas, il y expérimenta ses procédés de drainage de la lande. Auteur en 1887 d’un ouvrage sur « les Landes de Gascogne, leur assainissement, leur mise en culture et les débouchés de leurs produits », il fut Ingénieur en chef du Service Hydraulique de la Gironde. Un monument, élevé en 1907 à Pierroton, lui rend hommage bien que son rôle ait été parfois contesté
[70] L’instituteur Seurin (Monographie de la commune du Porge pour l’Exposition Universelle de
1899- manuscrit) indique 3 ventes successives en 1855 (352),1862(1214) et
1868 (655° ce qui donnerait
[71] ADG 7M 643 document de 1866.